
Jean Noël Aletti, « Unbelief and faith in Luke 1:5-25: Why does Luke’s
account begin with unbelief ? »……………………………………………………. p.
*
Paul Béré, « Restaurer l’Alliance : la fonction de Jos 8,30-35 dans la
logique interne du livre »…………………………………………………………….. p.
*
Modeste SoMé, « Eglise-Famille-de-Dieu : De la nouvelle genèse d’un
concept ecclésiologique à l’époque contemporaine » ……………………… p.
*
Mathieu NdoMBA, « Relationalité sociale et exigences de la justice pour
l’émergence d’un ordre social juste »……………………………………………. p.
*
thérèse SAMAké, « La métaphore de la peur dans l’expérience de la mort
à soi : de la liberté illusoire de l’audace à la liberté effective de la peur »
………………………………………………………………………………………………… p.
Michael lANgloiS, Le texte de Josué 10 : Approche philologique, épigraphique et diachronique, Coll. Orbis Biblicus et Orientalis 252 ; Fribourg-Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 2011, 266 pages ; Bambi kiluNgA, Prééminence de Yhwh ou autonomie du prophète : Etude comparative et critique des confessions de Jérémie dans le texte hébreu et la « Septante », Coll. Orbis Biblicus et Orientalis 254 ; Fribourg-Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 2011, 216 pages ; e. MveNg – r. J. Z. WerBloWSky (dir.), Le congrès de Jérusalem sur l’Afrique noire et la Bible (24-30 avril 1972) / The Jerusalem Congress on Black Africa and the Bible (April 24-30, 1972), Yaoundé, Presses Universitaires de l’Université Catholique d’Afrique Centrale, 2013, 278 pages ; Marco MoerSchBAcher, Les laïcs dans une Église d’Afrique. L’oeuvre du Cardinal Malula (1917-1989), Paris, Karthala, 2012, 276 pages ; Maurice cheZA, Le deuxième Synode africain : Réconciliation, Justice et Paix, Paris, Karthala, 2013, 435 pages ; henriette dAgri diABAté, Le Sanvi : Un royaume akan (1701–1901). Préface de Marc Augé, Abidjan-Paris-Marseille, Editions du CERAPKarthala- IRD, 2013, deux volumes : volume 1 : 621 pages ; volume 2 : 617 pages ; Stan chu ilo, The Face of Africa : Looking Beyond the Shadows, Oregon, WIPF & Stock, 2012 (second edition), 471 pages.
S’il fallait en très peu de mots traduire Kanien, le titre de cette nouvelle revue, l’on reprendrait volontiers l’exclamation : Fiat lux ! Ce n’est point pour mimer l’acte divin de parole au commencement, mais pour traduire un voeu profond du corps enseignant de l’Institut de Théologie de la Compagnie. C’est en effet la matérialisation de notre désir de faire jaillir une étincelle de lumière dans l’espace africain du croire et du vivre ensemble, afin que le feu qui s’allumerait en engendre d’autres. Pour ce faire, nous avons choisi de créer ce lieu de rencontre. Ainsi, se communiquera le labeur silencieux, quotidien et de longue haleine des penseurs de l’acte de croire en toutes ses nuances et géométries. Car l’objet du « théologique » ne convoque pas que la rationalité théologique. Toute rationalité ne demeure-t-elle pas inquiète tant qu’elle n’en perçoit pas la lumière ? La furie meurtrière « au nom de Dieu » ne l’a que trop rappelé. Faire donc jaillir cette flamme est une gageure. Le feu prendra si exégètes, théologiens, philosophes, anthropologues, sociologues, etc., se donnaient la main ou se passaient plutôt le relais à l’heure de la multidisciplinarité. Ce n’est point sacrifier à la mode, mais honorer la complexité du réel. Ce numéro inaugural en donne le signal. Comment la bonne nouvelle à laquelle on invite à croire peut-elle s’annoncer en commençant par un récit de non-foi ? (J.-N. Aletti) Quelle place donner à la justice dans la quête de la réconciliation certaines pages dites violentes, voire sanglantes, des Ecritures ? (P. Béré) Si l’on attend du politique qu’il construise « un ordre social juste » (Africae munus n.22), quelle partition l’Eglise devrait-elle jouer pour que les humains vivent en harmonie ? (M. Ndomba) D’ailleurs, l’Eglise en Afrique se 6 veut « Famille de Dieu ». Pour mieux le comprendre ne faut-il pas en découvrir l’origine dans son passé composé ? (M. Somé) Autant de questions ont habité les recherches que nous publions. D’autres suivront. Nous ne cesserons pas de questionner et d’interroger aussi bien nous-mêmes que les autres. Nous ne laisserons nulle place où l’esprit critique ne passe et repasse. Les articles qui rendent compte de nos lectures indiquent, eux aussi, que la quête de la lumière passe également par l’écoute des autres. N’oublions pas l’ultime visée de tout cet effort : transformer notre regard sur nos vies et sur le monde en éclairant nos esprits ; soutenir l’audace de chemins inconnus pour que nous engagions nos énergies pour rendre cette terre un lieu de gloire pour Dieu. La revue Kanien sera attentive aux événements sociaux et ecclésiaux pour les décrypter et les traduire dans les catégories aussi bien de la raison tout court, que de celle confessante. En cette année de la foi, nous suivrons l’encyclique Lumen fidei qui vient d’allumer son étincelle ; Pacem in terris de Jean XXIII qui continue en son cinquantenaire (1963-2013) de produire ses fruits dont la canonisation imminente de son auteur par le Pape François, premier Jésuite à assumer cette charge dans l’Eglise.
RESUME DES DIFFERENTS ARTICLES DU NUMERO
Unbelief and faith in luke 1:5-25 Why does luke’s account begin with unbelief ?
To begin a story always involves something arbitrary. Some authors prefer to comply with the order of events; others start from the most recent facts which they explain through what preceded. This allows them to draw insights from the events of the past. Luke’s account, following the models of his time, opens with birth narratives, right from the beginning !It is however strange that a story whose purpose is to proclaim the good news begins with a non-faith episode. One wonders why the narrator does not pass over in silence the non-faith of Zechariah. Did he want to create a contrast with the faith of Mary in the next episode? Was it to show that God’s will and power can overcome all human resistance? A convincing response requires that the episode be read with the tools of narrative analysis. The episodes of Luke 1–2 have already been subjected to many studies, but their narrative features were not satisfactorily recognized, as it will be shown later. Multiform Parallelisms and their Functions From Lk 1:5 to 4:13, the most obvious narrative technique is the synkrisis, in other words, comparison. During that time, this technique etudeS 1. See, for exemple, Parallel Lives of Plutarch (50-125 d.C.). On this point, Ch.TALBERT, Literary Patterns, Theological Themes and the Genre of Luke-Acts, (SBLMS 20; Missoula, MT 1974), 15-29, shows various parallelisms used by Luke in different sections or chapters in the Gospel or in Acts respectively, and between the two books,Luke and Acts, as well.8 was widespread1, and as such, Luke is not original. It suffices here to present all the elements of the technique already remarked because of their importance. Indeed, there are two sets of parallels between John the Baptist and Jesus. The first relates to the birth announcements made by the angel Gabriel to Zechariah and Mary, and the second to their realizations, i.e. the birth as such and the events that accompany them, as indicated in the following scheme:
Relationalité sociale et exigences de la justice pour l’émergence d’un ordre social juste
Le numéro 22 de l’Exhortation post-synodale Africae munus affirme que «la construction d’un ordre social juste relève de la compétence de la sphère politique. Cependant, une des tâches de l’église en Afrique consiste à former des consciences droites et réceptives aux exigences de la justice pour que grandissent des hommes et des femmes soucieux et capables de réaliser cet ordre social juste par leur conduite responsable »1. Cette distinction circonscrit très clairement le grand rôle qui revient à l’Eglise dans la construction d’un ordre social juste. Pour Africae munus, en effet, ce rôle spécifique consiste à former les consciences aux « exigences de la justice » nécessaires pour la genèse d’un tel ordre. Une question naît inévitablement : quelles sont ces « exigences de la justice » auxquelles l’Eglise doit former les consciences pour qu’advienne un ordre social juste en Afrique ? Il y a des questions sous-jacentes à celle-ci : qu’entend-on par « ordre social juste » ? Qu’est-ce qu’une société juste ? Cette étude vise à clarifier la notion d’« ordre social juste », en vue d’identifier les « exigences de justice » nécessaires pour son émergence. L’argument de base de la réflexion est que, si nous considérons le poids du communalisme africain dans la compréhension de la vie sociale, l’ordre juste en Afrique se rapporterait alors à la justice et à l’équité, requises par les différents modes de relationalité sociale au sein d’une collectivité politique. Cet article identifie trois modes de relationalité sociale : commutative, institutionnelle et citoyenne. Les exigences de justice relatives àchacun de ces modes deviennent ipso facto des exigences de justice pour la construction d’un ordre social juste en Afrique. Ainsi, l’article compte quatre sections. La première section clarifie la notion d’« ordre social juste » tout en montrant son lien avec la notion du bien commun et les modes de relationalité sociale. Les trois autres sections portent sur les exigences de justice qui émergent de
chacun des modes de relationalité sociale.
Restaurer l’Alliance : la fonction de Jos 8,30-35 dans la logique interne du livre*
La présente étude examine la fonction de Jos 8,30-35 qui poseproblème au point de vue exégétique, car, selon une étude récente, « The function of the passage in the context of MT has become an even more urgent question »1, et la solution exégétique que je propose enrichirait, me semble-t-il, notre étude des conflits et réconciliation en Afrique. En effet, le récit invite son auditoire à contempler Josué, agent de « réfection » de relations abîmées. Par la faute d’un seul (Achan), la communauté de l’Alliance subit les affres de la défaite ; par la vertu d’un seul (Josué), elle retrouve son intégrité2. Comment cela s’opèret-il ? Qu’est-ce que cette « signification » du texte « désigne »-t-elle dans l’aujourd’hui de notre auditoire ? Ce sont là quelques préoccupations que cette étude prendra en charge chemin faisant. Après un examen des problèmes que l’on rencontre à la lecture du texte de Jos 8,30-35, et surtout ceux que soulève la place de ce passage dans le livre de Josué, je m’engagerai dans la recherche d’une solution émergeant de la « logique interne »3 du récit contrairement aux solutions habituelles qui me semblent relever plutôt d’une « logique externe ». Jeferai davantage ressortir la manière dont les problèmes ont été abordés dans l’étude de cette péricope en particulier et du livre4 en général.
Eglise-Famille-de-dieu :de la genèse d’un concept ecclésiologique à l’époque contemporaine
L’expression « Eglise Famille de Dieu » n’est pas attestée expressis verbis dans la Bible. On la rencontre par contre, pour la première fois à l’époque contemporaine, dans les schémas préparatoires de la Constitution dogmatique Lumen Gentium, où il a été, après maintes explications sur ses fondements bibliques et anthropologiques, ajouté au nombre des images classiques de l’Eglise1. Son développement théologique ou ecclésiologique, dans l’Eglise d’Afrique, a commencé au lendemain du Concile OEcuménique Vatican II, dans les années soixante-dix. Depuis lors et durant deux décennies, la réflexion théologique en la matière a connu des avancées majeures et significatives. Mais au regard de la récurrence des thématiques développées par les auteurs les plus représentatifs2 de la théologie de l’Eglise Famille de Dieu, force est de constater que la mission à eux confiée par le pape Jean-Paul II, en l’occurrence la mise en relation du concept d’Eglise Famille de Dieu avec les images ecclésiologiques traditionnelles, est loin d’être accomplie. D’où le besoin de revenir à la genèse contemporaine du concept, à son contexte d’émergence, au coeur de la pluralité des modèles pour rendre possible la réélaboration du discours théologique sur l’Eglise Famille de Dieu. Pour ce faire, cette étude propose une première investigation sur l’origine historique du concept de l’Eglise comme Famille de Dieu, à notre époque, en deçà de l’expression elle-même. On espère ouvrir, de cette façon, de nouvelles perspectives, susceptibles de relancer la réflexion ecclésiologique sur l’Eglise Famille de Dieu.
La métaphore de la peur dans l’expérience de la mort à soi : de la liberté illusoire de l’audace à la liberté effective de la peur
Une bonne expérience, jugée à l’échelle de l’opinion publique, paraît paradoxale sous le prisme de la philosophie de Hegel. De quelle expérience s’agit-il ? De l’expérience de la mort-à-soi pour l’avènement de la liberté. Si dans la logique de la modernité, la liberté est ce qui est essentiel et inhérent à la nature de l’homme, selon le philosopher hégélien, sa réalité s’offre comme une complexité dont il convient de prendre la mesure. Le mouvement qui précède l’avènement de la liberté concrète, en effet, montre bien que, sous mode nécessaire, ce qui la fait être est essentiellement la médiation qui s’énonce sous l’angle d’une mort-à-soi. C’est dire que, pour l’individu, l’accès à la vraie liberté advient à condition qu’à lui-même il se donne à connaître, qu’il aille au bout de lui-même. C’est pourquoi la liberté sera vue ici comme ce en quoi se nouent la vie et la mort. Cette conception de la liberté ne manque pas de fondement. La Phénoménologie de l’esprit, à travers la relation dialectique « domination et servitude », nous en fournit une raison fondamentale : Inscrire une réflexion sous cette affirmation n’est pas, l’on espère, céder à une facilité qui se jouerait des commentaires déjà « certifiés » en procédant simplement à leur reprise, mais plutôt analyser les différentes identités et attitudes des deux consciences devant la mort dans la dialectique de « domination et servitude » de Hegel. La tâche consiste à aborder la réalité et le sens de la liberté dans les différentes figures que représentent le maître et le serviteur face à la mort. Une telle exigence déplace les questions politiques et sociales pour la simple raison qu’aucune attitude n’est d’avance privilégiée et ne peut donner la moindre idée de la liberté authentique ou de l’identité libérée : il faut vivre l’expérience de la mort-à-soi. Alors s’impose le questionnement suivant : si la mort-à-soi est chemin de liberté, laisset- elle une place dynamique à l’identité de l’individu ? L’audace du dessaisissement de soi n’est-elle pas elle-même le vouloir du maintien de soi, une fuite anticipée devant ce pour quoi l’on paraît dominant ?